En juillet 1896, Dawson City n’existait même pas; un an plus tard, la ville abritait une population de 5 000 habitants, et l’année d’après, 30 000. Forty Mile, à un moment donné la plus importante agglomération dans le territoire, était pratiquement désertée. Charles Constantine, inspecteur de la P.C.N.‑O. en poste à Forty Mile, avait été le premier — et pendant longtemps, le seul — administrateur du règlement minier au Yukon, mais en 1897, le bureau a été transféré à Dawson.
Les billets de banque étaient rares à Dawson. La principale monnaie était la poudre d’or — qui valait environ 16 $ l’once. Quantité d’autres choses étaient tout aussi rares. Ainsi, il était presque impossible de trouver un endroit où vivre, même si on était prêt à payer le gros prix. Et faire construire sa propre cabane était une proposition elle-même très coûteuse : selon Thomas Fawcett, « le bois d’œuvre, qui en Ontario se négociait tout juste à 6 $ ou 7 $ les 1 000 pieds, se vendait sans difficulté 140 $ pour la même quantité. »
Certains se sont trouvé un emploi dans la ville ou dans une mine. On achetait, vendait ou louait des concessions pour faire un profit ou parce que leur propriétaire avait désespérément besoin d’argent. Une petite annonce parue dans le Klondike Nugget le 27 juillet 1898 traduit éloquemment l’indigence dans laquelle se trouvait l’auteur : « À vendre — Céderait la moitié d’une concession contre des vivres pour un an. »
Dans les premiers mois de 1897, les Tr’ondëk Hwëch’in avaient abandonné Tr’ochëk pour aller s’établir plus en aval à un endroit baptisé Jëjik Ddhä̀ Dë̀nezhu Kek´it (Moosehide). Certes, la ruée vers l’or a eu certaines retombées économiques positives pour les membres des premières nations du Yukon, mais elle a aussi entraîné de graves bouleversements sur les plans social et culturel.
Déjà vers la fin 1898, la ruée commençait toutefois à ralentir. Avant même que certains qui avaient entrepris le voyage arrivent à Dawson, leurs prédécesseurs s’étaient déjà approprié presque toutes les parcelles qui présentaient un potentiel quelconque. Des milliers ont dû abandonner leur rêve de faire fortune et ont quitté le territoire. La découverte d’or à Nome, en Alaska, en 1899, a entraîné l’exode de milliers d’autres. Les hordes se sont refoulées presque aussi vite qu’elles étaient montées à l’assaut du Klondike, laissant derrière elles une communauté cosmopolite dotée de l’électricité, du téléphone, de quantité de bâtiments d’importance et de quatre journaux.