À la mi-août 1896, un prospecteur américain du nom de George Carmack, sa femme Kate (Shaaw Tláa), le frère de cette dernière, Skookum Jim (Keish), et leur neveu Dawson Charlie (Káa Goox) traversaient la région au sud de la rivière Klondike. Alors qu’ils se reposaient le long d’un petit ruisseau que les mineurs appelaient le ruisseau Rabbit, l’un d’eux remarqua quelque chose de métallique qui scintillait dans l’eau. C’était de l’or.
Le lendemain matin, soit le 17 août, ils se sont empressés de jalonner leurs concessions. Carmack a jalonné une concession qui incorporait l’endroit où l’or avait été trouvé, s’attribuant ainsi le mérite de la découverte en plus de se rendre admissible à une deuxième concession du fait que sa première était la toute première concession à avoir été jalonnée le long du ruisseau. Ils se sont ensuite rendus à Forty Mile, où se trouvait le bureau du registraire minier le plus près, soit à 80 km de là, pour y enregistrer leurs concessions. L’enregistrement a eu lieu le 24 septembre, bien en deçà de la limite de 60 jours imposée par le règlement minier.
La nouvelle s’est propagée à la vitesse de l’éclair le long du fleuve Yukon. Les mineurs de Circle City et des régions avoisinant les rivières Fortymile et Sixtymile ont tout abandonné pour se précipiter vers le Klondike et jalonner la moindre parcelle sur laquelle ils pouvaient mettre la main le long du ruisseau — rebaptisé Bonanza peu de temps après —, de ses tributaires et de tout autre cours d’eau dans le secteur. Une petite agglomération, du nom de Dawson City, a bientôt vu le jour au confluent du fleuve Yukon et de la rivière Klondike.
Ce n’est qu’un an plus tard que la nouvelle est parvenue au reste du monde. L’or extrait des cours d’eau durant le premier hiver n’avait pu être envoyé à l’extérieur qu’en juin 1897, suivant la reprise du transport naval. Les mineurs ont dû se rendre avec leurs précieuses cargaisons de Dawson à St. Michael, à l’embouchure du fleuve Yukon, avant de s’embarquer sur l’Excelsior ou le Portland, les deux navires à vapeur au long cours qui effectuaient le trajet vers les ports de la côte Ouest.
L’Excelsior a accosté à San Franciso le 17 juillet avec une cargaison d’or évaluée à un demi-million de dollars. Il n’en fallait pas plus pour électriser la population. À son arrivée à Seattle trois jours plus tard, le Portland a été accueilli par une foule immense. Un journaliste plus entreprenant que les autres — Beriah Brown, du Seattle Post-Intelligencer —, s’était fait amener par un bateau-remorqueur pour intercepter le navire et avait télégraphié au journal que les cales contenaient « une demi-tonne d’or ». La manchette parue en primeur était, en fait, nettement en dessous de la réalité : la cargaison d’or pesait plus d’une tonne et était estimée à un million de dollars. Comme l’écrivait un auteur de l’époque, l’annonce de ce que transportait le Portland « a embrasé Seattle et s’est répandue comme une traînée de poudre à travers le monde civilisé. »